L’adoption internationale

Qu’est-ce qu’une adoption internationale ?

Une adoption peut être considérée comme internationale dès lors que les personnes concernées n’ont pas toutes la même nationalité et seulement cette nationalité ou que plusieurs pays sont concernés (déplacement de l’enfant adopté à prévoir pour rejoindre sa nouvelle famille par exemple). Cela ne signifie pas que les règles nationales seront nécessairement exclues, mais cela suppose à tout le moins de s’interroger précisément sur les règles internationales ou nationales applicables à l’adoption considérée.

Peut-on faire prononcer une nouvelle adoption en France lorsqu’une adoption a déjà été prononcée à l’étranger ?

Sauf cas particulier, il ne peut être question à mon avis de prononcer une nouvelle adoption en France lorsqu’une adoption a déjà été prononcée à l’étranger, pas plus qu’il n’est possible de se marier avec la même personne ou de divorcer de la même personne une seconde fois en France lorsqu’un mariage ou un divorce a été valablement célébré ou prononcé à l’étranger.

C’est pourtant fréquemment vers cette voie que les familles sont orientées lorsqu’elles veulent faire reconnaître une adoption prononcée à l’étranger en France et qu’elles s’adressent aux services civils du Parquet du procureur de la République territorialement compétent. Bien souvent, il leur est demandé de remplir un formulaire de « requête aux fins d’adoption » (simple ou plénière) alors que cela est à mon sens juridiquement infondé.

Un enfant ne me parait en effet pas pouvoir faire l’objet d’une deuxième adoption : prononcer une nouvelle adoption en France ne devrait être possible que lorsque l’adoption étrangère a été jugée irrégulière par un tribunal français et ne peut donc juridiquement être considérée comme valable en France. Dans ce cas et dans ce cas seulement, une nouvelle adoption peut être prononcée en France lorsque les conditions pour une telle adoption sont réunies. Il s’agira alors de prononcer l’adoption en France d’un enfant étranger, ce qui ne conduit pas à appliquer les mêmes règles que lorsqu’il s’agit de reconnaître une adoption étrangère en France : bien des professionnels intervenant dans ce domaine l’ignorent totalement et peuvent vous dire que votre adoption internationale est irrégulière, car elle ne respecte pas les règles applicables pour une adoption en France alors que C’EST FAUX.

Faut-il avoir recours à un avocat pour faire reconnaître une adoption internationale en France ?

La situation avant 2010

Jusqu’en 2010, les adoptants pouvaient bien souvent se passer du recours à un avocat en France en matière d’adoption internationale.

Par exemple, lorsque l’enfant avait fait l’objet à l’étranger d’une adoption ayant en France les effets d’une adoption simple, il suffisait le plus souvent aux parents de se rapprocher du procureur du Tribunal Judiciaire (nouvelle appellation du Tribunal de grande instance depuis le 1er janvier 2020) dont ils dépendaient pour solliciter une conversion en adoption plénière, sur la base d’un consentement des parents biologiques. Ce consentement était parfois très éloigné des exigences de la loi française, voire totalement inexistant.

Un formulaire leur était fourni par les services du procureur de la République, ils devaient le remplir et joindre les documents sollicités. Le tout était transmis au Tribunal, le procureur s’opposait rarement à leur demande et l’adoption plénière était le plus souvent prononcée dans des délais relativement brefs. Les parents, le procureur et les tribunaux estimaient que l’adoption plénière était la plus conforme à l’intérêt de l’enfant. Elle était donc prononcée sans grandes difficultés et, il faut le dire, parfois même sans réellement se demander si les textes applicables étaient réellement respectés.

Beaucoup de choses ont changé au cours de l’année 2010.

Il existe désormais des Tribunaux de Grande Instance spécialisés en matière d’adoption (par exemple, le Tribunal Judiciaire de Nantes est désormais le seul compétent pour tout le ressort de la Cour d’appel de Rennes, soit le Finistère, les Côtes-d’Armor, le Morbihan, l’Ille-et-Vilaine et la Loire-Atlantique).

À la suite de divers événements dramatiques, les autorités françaises ont été conduites à s’interroger sur l’existence d’éventuels abus dans le recours à l’adoption internationale. Cela a particulièrement été le cas en ce qui concerne Haïti, notamment depuis le séisme du 12 janvier 2010 : à la suite des instructions des différents ministères concernés (Justice et Affaires étrangères), les différents procureurs de la République ayant à se prononcer sont devenus beaucoup plus réticents à donner un avis favorable à des conversions en adoption plénière. C’est ainsi qu’au cours de l’année 2010, des avis défavorables ont été systématiquement rendus dans des dossiers qui auraient sans aucun doute encore donné lieu à des avis favorables quelques mois plus tôt, certains tribunaux, dont le Tribunal Judiciaire de Nantes, suivant ces avis alors qu’ils statuaient jusque-là en faveur de la conversion en adoption plénière, dans des dossiers rigoureusement identiques, sur la base des mêmes documents, parfois pour des familles ayant déjà adopté des enfants, le tout sans le moindre changement législatif…

C’est ainsi que des parents qui ont adopté quelques années ou parfois même quelques mois plus tôt des enfants qui ont fait l’objet d’une adoption plénière ont vu des adoptions simples prononcées, ce qui ne va pas sans poser quelques difficultés quant à l’égalité de droits entre les enfants d’une même famille

Que faire ?

Dès lors que l’enfant est légalement entré en France, avec l’aval des autorités étrangères et françaises, la préoccupation de chacun doit être l’intérêt de l’enfant.

Les possibilités en matière d’adoption internationale dépendent de différents textes, aussi bien internationaux, qu’étrangers ou français.

Les parents doivent avoir une approche réaliste de ce qu’ils peuvent obtenir : dans certains cas, leur objectif raisonnable doit être de faire reconnaître une adoption simple, dans d’autres, une adoption plénière, dans d’autres enfin, d’obtenir une conversion en adoption plénière.

Ils doivent malheureusement être aussi conscients que certains intervenants dans ces procédures, bien que censés être spécialisés dans cette matière, ne la maîtrisent pas vraiment (ces deux derniers mots pourraient être inversés) : c’est ainsi que j’ai eu à de trop nombreuses reprises à constater que des familles se voyaient refuser l’existence d’une adoption plénière alors que les conditions en étaient remplies ou qu’elles se sont vu dire que l’adoption prononcée à l’étranger était irrégulière alors que ce n’était pas le cas.

La totalité des dossiers dans lesquels j’ai dû faire appel devant la Cour d’appel de Rennes en 2013 et 2014 ont ainsi abouti à reconnaître l’existence d’adoptions plénières alors que cela avait été refusé par le procureur de la République de Nantes puis le Tribunal Judiciaire de Nantes. Cela ne signifie absolument pas que je prétends obtenir la reconnaissance d’adoptions plénières dans tous les cas : cela signifie seulement que bien des familles se font refuser la reconnaissance d’une adoption plénière de manière injustifiée et qu’il ne faut donc pas hésiter à faire vérifier si vos droits et ceux de vos enfants ont bien été respectés. Il n’y a aucune raison que vous n’obteniez pas un statut que la loi vous autorise à obtenir.

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